Logo pour impression Antiquaille - Fouille et étude du bâti

Antiquaille - Fouille et étude du bâti

Sol de terrazzo et emblema en
cours de dégagement © SA Ville de Lyon

Adresse: 1 rue de l'Antiquaille

Période(s) d'occupation: Antiquité, Moderne, Contemporain

Opération : fouille préventive et étude du bâti du rez-de-chaussée et des caves du cloître (achevées)

Dates de l'opération: octobre-novembre 2010 pour l’étude du bâti et avril-juin 2011 pour les suivis de terrassement

Opérateur : Service archéologique de la Ville de Lyon

Aménageur : ECCLY


Les traces d’occupation antique mises au jour au cours de la fouille sous les ailes nord et sud du cloître ont permis, pour la première fois, de prendre connaissance de la topographie ancienne du site dans la partie nord du clos de l’Antiquaille. Cette dernière était organisée en terrasses. La terrasse supérieure se situait à une altitude comprise entre 258,45 et 259,15m NGF ; la terrasse intermédiaire était située trois mètre en contrebas, à la cote d’environ 256m NGF ; la terrasse inférieure était à environ 250,35m NGF d’altitude. A l’ouest, elles étaient toutes délimitées par une voie nord-sud qui rejoignait, au nord, le decumanus. Enfin, les deux terrasses hautes étaient maintenues, à l’est, par un mur de soutènement formé par une série de voûtes en cul-de-four dans sa partie nord et par un mur plein (à contreforts ?) dans sa partie méridionale.

Vestiges antiques découverts sous l’aile sud du cloître
(ancienne pièce chaude d’un bâtiment) © SA Ville de Lyon

Période antique

Les quelques vestiges antiques mis au jour sur la terrasse supérieure du site présentent une orientation nord-sud tout à fait semblable à ceux découverts sur le reste du clos, ainsi qu’au nord, et imposée par l’orientation des voies qui bordent les terrasses au nord et à l’ouest. Ils témoignent d’une occupation au cours des deux premiers siècles de notre ère, mais ils ne permettent pas de préciser le type d’occupation. L’hypothèse d’un habitat privé assez luxueux (présence de mosaïques, d’une pièce chauffée) semble toutefois pouvoir être retenue en dépit d’autres indices. Un vestige, dont le rattachement à la période antique n’est pas totalement attesté, demeure toutefois énigmatique : il s’agit d’une imposante cuve, peut-être semi-enterrée et d’un diamètre interne de 2,6m pour une hauteur minimale de 2,1m. Les techniques et les matériaux mis en œuvre dans sa construction, à l’exception de l’emploi du calcaire à gryphées pour son dallage, ressemblent fortement à ce que l’on connaît pour l’Antiquité. En revanche, la fonction de ce type de structure demeure méconnue (stockage ?).
Fragments d’enduit peint ornant le mur pignon
de l’ancienne maison de Pierre Sala
(début du XVIe siècle)© SA Ville de Lyon

Période moderne

Pierre Sala et ses héritiers

Lorsque Pierre Sala fait construire sa « maison des champs » dans le clos de l’Antiquaille, au début du XVIe siècle, la topographie antique du site demeure fortement marquée dans le paysage. Sa bâtisse prend d’ailleurs appui sur un mur de soutènement hérité de l’Antiquité et constitué d’arcades en cul-de-four. Aujourd’hui, seule l’arcade nord demeure visible, tout comme le contrefort moderne qui lui a été accolé et qui marque l’angle nord-est de la maison. A l’intérieur du bâti actuel, il ne semble subsister de la maison de Pierre Sala qu’une partie de son mur pignon septentrional. Ce dernier a donc pu être étudié en détail et, bien qu’extrêmement modifié au cours des siècles suivants, il nous a livré quelques informations intéressantes. Ainsi, on a pu mettre mis au jour une de ses fenêtres hautes, dont l’arc en calcaire jaune des Monts d’Or présentait des traces de peinture rouge. Un important fragment d’enduit peint a également été mis au jour sur la face interne du mur : les motifs représentés n’ont pas pu être interprétés compte tenu de leur caractère trop lacunaire.
La maison de Pierre Sala ne comportait qu’un rez-de-chaussée auquel on peut toutefois ajouter un niveau sous les combles. Sa limite nord est donc parfaitement identifiée et l’on peut, en se fiant aux cinq arcades figurées en soubassement sur plusieurs gravures, restituer sa limite méridionale qui devrait se situer approximativement à hauteur du mur sud de l’actuelle tour médiane. Le positionnement de sa façade occidentale demeure quant à elle plus imprécise.
Enfin, à une époque qu’il est difficile de préciser, soit du temps de Pierre Sala, soit à l’époque de ses héritiers, les Buatier, mais quoi qu’il en soit avant l’agrandissement de la maison par ces derniers, un contrefort est adossé au mur pignon nord de la maison.
Au cours de la seconde moitié du XVIe siècle, mais à une période qu’il est encore une fois difficile de préciser, les Buatier agrandissent et surélèvent la maison. Cet agrandissement se fait essentiellement en direction du nord. Une petite portion de la façade occidentale de la nouvelle bâtisse et surtout son chaînage d’angle nord-ouest ont pu être mis au jour. Toutefois, la liaison entre cet angle et l’extrémité nord-est de la maison, qui comporte un pavillon en saillie vers l’est, demeure méconnue.
Les fouilles et l’étude de bâti menées dans l’aile nord du cloître ont également permis de mettre en lumière un aspect jusque-là méconnu de l’occupation du site au XVIe siècle. En effet, de nombreux murs appartenant autrefois aux communs ont pu être identifiés. Ils semblent dessiner au moins quatre petits bâtiments mitoyens et bâtis le long de la montée Saint-Barthélémy. A l’origine, ils étaient certainement, pour bon nombre d’entre eux, bâtis en pisé sur un soubassement maçonné (l’un d’eux est d’ailleurs encore conservé sous cette forme). A de rares exceptions près, il est toutefois difficile de les rattacher à la période Sala ou à la période Buatier.
A ces bâtiments extérieurs, constituant une partie des communs du domaine, il est également possible d’associer une cave, identifiée lors d’un précédent diagnostic et située au sud de la maison principale. Pourrait-il s’agir de la cave du « grangier » mentionnée dans le contrat de location de la maison des Buatier en 1586 ? La question demeure ouverte.

Le couvent

Les vestiges du couvent des Visitandines – et plus particulièrement du cloître – n’ont finalement été que modérément concernés par notre étude. Ils ont déjà été largement étudiés au cours des différentes campagnes de diagnostic ou de fouilles qui se sont succédé depuis 2007.
L’un des principaux apports de notre étude consiste en la mise en lumière d’une réutilisation massive des maçonneries héritées du XVIe siècle dans les bâtiments du cloître. Ainsi, sur les douze murs appartenant aux anciens communs, au moins la moitié ont été conservés lors de la construction du cloître afin de servir de murs de refend. Certains ont fait l’objet de reprises en sous-œuvre, d’autres ont été légèrement modifiés ou encore percés d’ouvertures. A l’inverse, parmi tous les murs de refend de l’aile nord du cloître, seul un semble être une création totalement nouvelle ! Certains sols de travail liés à ces travaux ont pu être analysés et le mobilier céramique retrouvé est tout à fait en adéquation avec une campagne de travaux couvrant les années 1630.
Lorsqu’elles prennent possession de leur domaine, les Visitandines s’installent donc dans le logis acheté aux Buatier, qu’elles adaptent ensuite en l’englobant dans leur cloître. En revanche, les façades du couvent sont majoritairement refaites à neuf ou font au moins l’objet d’un ravalement profond, et cela dans un souci d’homogénéité architecturale évident. Ainsi, la façade sur rue de l’aile nord du cloître est une création nouvelle ; elle remplace les façades des communs qui devaient présenter de ce coté de grandes irrégularités avec plusieurs décrochements. Le mur de l’aile nord donnant sur la galerie du cloître semble également en grande partie reconstruit, même s’il prend ponctuellement appui sur des maçonneries plus anciennes.
Une autre découverte importante, cette fois en lien avec l’histoire mythique du lieu, a été faite dans les caves situées sous la cour du cloître. La grande cuve circulaire, potentiellement héritée de l’Antiquité, nous a en effet livré l’un de ses secrets. Elle était utilisée comme réservoir par les Visitandines afin d’alimenter en eau le petit bassin disposé dans le « cachot » de saint Pothin. Pour ce faire, un tuyau de plomb avait été inséré dans les parois de la cuve et cela jusqu’au cachot distant d’environ un mètre. On doit cet aménagement à la mère de Riants qui, dans un manuscrit daté de 1695, « eut l’inspiration de prier saint Potin de donner la vertu des saintes Reliques à l’eau qu’on feroit reposer dans son Cachot ; grâce qu’il luy accorda en telle sorte que depuis l’on donna continuellement de cette eau salutaire qui guérissoit toutes les maladies et qui faisoit de grand miracles et qui continüe ».


Période contemporaine

Le début du XIXe siècle voit la transformation des bâtiments de l’Antiquaille en hospice, qui deviendra hôpital en 1876. Durant les premières décennies, l’adaptation des bâtiments à leurs nouvelles fonctions ne semble nécessiter que des transformations ponctuelles. A l’extrémité est de l‘aile nord du cloître, il a par exemple été découvert un hypocauste destiné à chauffer une petite pièce, peut-être une étuve.
Au milieu du siècle des travaux plus importants ont lieu, comme notamment la surélévation des bâtiments du cloître situés devant la chapelle, puis la création d’une chapelle souterraine annexée au caveau de saint Pothin, sous le quart nord-ouest de la cour. Mais les travaux les plus conséquents ont lieu au début des années 1880 et ont consisté à reconstruire entièrement l’aile orientale du cloître et les deux tiers de son aile sud. Ces travaux ont achevé de mettre à mal les arcades en cul-de-four antiques soutenant l’ancienne façade orientale du couvent et cela explique sans doute que cette période soit caractérisée par un emploi coutumier de tuf antique en remploi dans les maçonneries. De nouvelles caves sont aussi creusées sous la moitié orientale de la cour du cloître.
Enfin, la fin du XIXe siècle est marquée par la création, à l’instar des nouveaux bâtiments de l’hôpital, de grandes pièces – de type dortoir – à l’intérieur des anciens bâtiments du couvent, ce qui a pour conséquence la suppression ou le fractionnement de la plupart des murs de refend.

Dernière modification : 29/08/2013 11:00